Sois belle, pas intelligente

Il y a des années, j’avais lu un article qui disait que sur les sites de rencontre, il était un meilleur investissement pour les femmes de se teindre les cheveux en blond plutôt que d’avoir un diplôme universitaire, selon une étude qui avait été sauf erreur conduite aux USA. A l’époque, j’avais été un peu choqué de cette comparaison. Tout d’abord elle semble un peu absurde de par la nature très différente des deux investissements et leur caractère non-exclusif : rien n’empêche une universitaire de se faire une teinture. Ensuite, j’ai longtemps considéré indispensable d’avoir une femme intelligente.

Or il n’en est rien. Un couple bien assorti doit pouvoir se comprendre sur le plan intellectuel. Certes, si je suis un mordu de grandes symphonies, porté à m’interroger sur le fonctionnement du monde, je risque de trouver peu de résonance chez une femme qui ne se pose jamais aucune question dans la vie, fan de foot et de musique pop. Mais, il ne faut pas en tirer des généralités : être un intellectuel, n’est pas quelque chose de vraiment normal, y compris dans les professions plutôt intellectuelles.

Donc évidemment qu’une femme complètement cruche n’a jamais trouvé sa place dans mon coeur. Il m’est arrivé de rencontrer de charmantes personnes, assez belles pour que j’aie envie de leur parler, mais aux propos tellement vides que je ne pouvais pas maintenir la discussion plus de 10 minutes. Qui sait, peut-être que j’ai eu tort de ne pas persévérer avec l’une ou l’autre d’elles. Dans tous les cas, je n’ai pas l’expérience, ni chez moi, ni dans mon entourage où une déficience intellectuelle de madame pouvait poser problème dans le couple. On peut donc imaginer qu’un homme qui s’entiche d’une telle potiche puisse être heureux de l’admirer, tel un bel objet qui de dépareille pas dans une voiture de prestige acquise en leasing.

Dans l’autre sens, quand l’homme est perçu comme un looser, cela semble plus difficile à gérer. Et là, des exemples, j’en ai.

Le tenace, irréductible optimiste

Lorsque j’ai connu le père de mon ex, ça faisait 7 ans qu’il était à son compte comme « agent immobilier ». Spécialisé dans une niche potentiellement très lucrative, il avait fait quelques visites, gagné quelques ventes, mais apparemment jamais perçu aucune commission. Il était doué d’un optimisme sans bornes et d’une naïveté dont sa femme et ses enfants se moquaient. Natif d’Amérique du Sud, il avait connu dans son pays son épouse, suissesse née d’expats de bonne famille. Tombé fou amoureux de cette jolie femme qui ne voulait pas de lui, il aurait insisté, persisté, chanté faux sous ses fenêtres, jusqu’à ce qu’elle finisse par accepter ses avances. Le fait est qu’à l’époque où j’ai fréquenté ces gens, je trouvais que toute la famille avait la triste habitude de mal parler de ou à ce père de famille, avec ce fameux « mais Ricardo » plein de reproche que lançait la mère à chaque fois qu’elle n’était pas d’accord avec lui.

Le coup de foudre

Après une période gothique et pleine d’excès à Zurich, amoureuse de la Suisse-Allemande, ma sœur est rentrée au bercail déprimée. Là, elle a troqué la bière contre l’eau, remplacé la liberté par l’Islam et s’est trouvé un magnifique Marocain, manutentionnaire dans le magasin de meuble où elle travaillait comme employée de commerce, tout en étudiant en parallèle.

Une histoire chaotique a commencé, pleine de passion pour cet homme merveilleux, avec un premier scandale parce que mes parents croisent quotidiennement ce type, sans que ma sœur le leur présente, ce qui correspondrait apparemment aux normes de sa culture d’origine. Notons au passage qu’il a grandi en Suisse, dont il a la nationalité.

Puis, un mariage qui a failli être carrément annulé, parce qu’un mauvais enregistrement du rendez-vous à l’état-civil avait été perçu comme un mauvais présage. L’évènement a finalement eu lieu, très simple: hôtel-de-ville, repas dans un restaurant chic sans que les familles se mélangent.

La vie suit son cours; deux charmants garçons maintenant adolescents qui naissent, grandissent et viennent à tout ce que mes parents organisent sans leur père, absent pour différentes raisons et victime par contumace de divers dénigrements.

Alors, aujourd’hui, que Monsieur ne gagne pas suffisamment sa vie et que son poste est apparemment menacé – quel emploi salarié ne l’est pas à un moment où à un autre – elle le blâme de s’abrutir devant la TV plutôt que de se former, sans se poser la question si le travail n’a pas déjà causé 80% de l’abrutissement, ni si son absence de soutien pouvait également y contribuer.

Une intellectuelle est-ce bien ?

La question se pose au vu des statistiques précitées. J’ai toujours préféré des femmes intelligentes, qui ont une certaine répartie. Mais n’aurais-je pas dû cibler des femmes qui ont la vocation d’être une bonne mère et une bonne épouse, plutôt que des carriéristes qui ont de grandioses projets professionnels – grandioses vus d’une femme ordinaire ? Intellectuelle ou pas n’est probablement pas la question. Une femme au foyer qui lit et expérimente des trucs n’a probablement pas moins à raconter qu’une employée qui fait des trucs débiles toute la journée – pour ma part, je n’ai d’ailleurs pas grand-chose à dire de mon job qui n’apporte rien d’autre qu’un salaire.

Mais évidemment, si tu es le gars stupide qui ne comprend pas ce que madame raconte, ou que tu as une formation très basique et qu’elle est universitaire, évidemment que ça peut s’en ressentir à un moment ou un autre de la relation, dès que la passion pure du début fait place à la routine du long-terme.

Évidemment, on peut mépriser le simplet, mais quand il se trouve sur le site de rencontre, comme dans la vraie vie, il a un peu plus de sens pratique que l’intellectuel de base. Plutôt que la difficulté et le défi si chers à l’intellectuel, il va chercher la simplicité. Sélectionner la même culture, même inculture, même profession simple. Rire, pizza, cinéma, plage, boules de neige. Et donc la jolie blonde plutôt que la docteure en physique nucléaire.